Interview avec Sabrina Fuchs

Intervenante pour le parcours Chargé.e.s de diffusion et production

Module 2

Parcours chargé.e.s de diffusion/ production

Élaborer une stratégie de production / diffusion et le plan d’action associé

Module 4

Parcours chargé.e.s de diffusion/ production

Construire sa prospection et vendre de son projet artistique

R : Tu interviens dans le parcours chargé.e de diffusion / production pour les modules “Élaborer une stratégie de production / diffusion et le plan d’action associé” et “Construire sa prospection et vendre son projet artistique” .

Qu’est-ce qu’un chargé de diffusion et de production selon ta définition ?

S : Dans le spectacle vivant, la production et la diffusion sont deux missions que je pense de manière conjointe, la logique et la réflexion doit être commune. Ceci puisque la production et la diffusion d’un spectacle sont des cycles continus et interdépendants.
La diffusion est la dernière étape de la production mais on doit monter une production en réfléchissant à une diffusion qui soit pérenne. Et finalement la diffusion d’un spectacle “ X ” va permettre le déclenchement de la production d’un spectacle “ Y ”…

Ces professions ont aujourd’hui une forte tendance à converger. Ce sont des rôles qui exigent les mêmes compétences, des outils communs, ainsi que des qualités et des savoir-faire identiques. Ce sont des métiers, je dirais, de patience et de rigueur. Pour développer un projet d’une compagnie, c’est important d’avoir une certaine finesse et de connaitre l’essence profonde de la compagnie, son parcours, la direction qu’elle veut prendre, se situer dans le moment du développement de sa structure… Et il faut aimer et avoir envie de défendre le projet artistique, bien évidemment !

R :  Pourquoi penses-tu que la stratégie et l’étude de l’environnement sont importants dans le métier de chargé de diff / prod ?

S : Souvent le mot “ stratégie ” est perçu comme un “gros mot” dans le secteur du spectacle vivant. Il est associé au vocabulaire marchand ou de l’entreprise. Il faut dépasser toutes ces représentations puisque le spectacle est un secteur à concurrence, et la concurrence est une réalité avec laquelle il faut travailler. 
 
Connaître et savoir pourquoi on s’adresse à des partenaires spécifiques pour un projet, cela change la qualité du travail de diffusion. La réflexion stratégique en amont, consiste à chercher la cohérence avec le projet artistique, cibler des lieux dans lesquels le spectacle peut avoir une vie, trouver les partenaires qui ont envie d’aller dans la même direction.
 
Il faut penser le rapport avec les lieux de diffusion comme un rapport de partenariat et non pas – comme souvent on a tendance à penser – comme un rapport de dépendance. C’est donc un exercice de représentation, de positionnement qu’il faut apprendre.
 

R :  Peux-tu nous raconter ton parcours ? Pourquoi as-tu choisi de transmettre tes connaissances / compétences ?

S : Pendant 12 ans j’ai été administratrice de production dans le spectacle vivant au sein de compagnies et de structure institutionnelle. Je me suis très vite intéressée à la question de l’accompagnement et du positionnement au travail dans le secteur : avec deux collaboratrices, en 2013 nous avons créé le bureau d’accompagnement “ Les Aiguilleuses ”. Entre autre, nous avons collaboré pendant 3 saisons avec “ARCADI”, établissement public de coopération culturelle associé à la Région Île-de-France, sur un dispositif d’accompagnement en binôme entre l’administrateur et l’artiste.
J’ai ensuite suivi un Master 2 en Sociologie clinique et psychosociologie à Paris VII, ce qui m’a donné des clefs pour continuer à étayer ma pratique professionnelle, former et accompagner.

Aujourd’hui je suis consultante, je fais de l’accompagnement individuel et collectif, de la formation, surtout dans le secteur culturel, mais aussi, depuis quelques années, dans le médicosocial. Je revendique dans mon travail une orientation psychosociologique, je trouve cela toujours très enrichissant de pouvoir accompagner des professionnels. Pendant mes formations j’essaie d’apporter un espace ouvert pour donner des outils, de la réflexivité et de la réflexion.

R : L’approche pédagogique de Sabrina Fuchs, donne-nous trois (ou quatre) mots pour la décrire…

S : Je dirais coopérative, à l’écoute, étayante et… outillante ! C’est ce que je souhaite pour ces formations.
Mes formations sont globalement interactives et ma pédagogie n’est pas descendante. J’apporte bien évidemment un savoir, des compétences et des outils de par mon parcours, néanmoins les modules s’adaptent à chaque promotion en fonction du niveau, des personnes, des parcours, des questions. C’est à cet endroit là où je parle d’interactivité : les modules s’adaptent à la réalité des participants et répondent aux questions qui sont les leurs. Pour que ça soit opérant pour eux.

R : Qu’est-ce qui selon toi est important à mettre en place pour le cadre de tes formations ?

S : Ce que je cherche constamment est de faciliter les échanges, de mettre à l’aise mes stagiaires, de trouver le dialogue. Je travaille avec des outils issus d’éducation populaire et de la psychosociologie, cela fait partie de mon orientation professionnelle. Le parcours est pensé ainsi : on travaille à partir de leurs questions, de leurs besoins et ceux de leurs compagnies. Des exercices permettent de rythmer la journée, leurs cas particuliers sont étudiés. On échange des supports, on travaille en binôme… On va collectivement répondre à la question de la personne, le but est que je ne sois pas la seule à pouvoir y répondre. Il s’agit vraiment de la réflexion plurielle dans l’espace que je propose.

R : Pourquoi as-tu choisi Confer  ou pourquoi Confer t’a choisie pour ce parcours de formation ?

S : Je dirais qu’on s’est choisis. Avec Nathalie Redant on a tout de suite parlé la même langue : on avait la même conception du métier, un parcours similaire sur certains points…Les choses se sont faites très naturellement car on partageait la même éthique de travail, les mêmes valeurs, la même manière de concevoir des parcours pédagogiques, la même envie de réfléchir sur des supports. Avec Julia ensuite, nous nous sommes retrouvées sur la conception du parcours et depuis le début c’est une relation très fluide. On s’est donc choisies mutuellement. A la fois sur la manière dont on a traversé ces métiers et sur les raisons qui nous ont fait comprendre l’importance de l’accompagnement. La vision du métier, la méthode, la pédagogie, on a un socle de valeurs communes qui permet d’avoir envie de travailler ensemble et de faire des choses ensemble. Parfois il y a des rencontres professionnelles qui sont des évidences : ça a été le cas !

R : Est-ce que les modules de la formation sont indépendants ou complémentaires ?

S : Ce parcours a été pensé avec des modules qui peuvent être suivi indépendamment, mais il y a une vraie logique d’ensemble et une complémentarité. Ce qui vaut aussi pour les modules où j’interviens, le 2 et le 4 : je les ai vraiment pensés conjointement, avec une certaine cohérence et des liens de suivi entre les deux, même si c’est totalement possible de les faire séparément. Dans tous les modules, il y a un versant technique et pratique, l’idée étant que les chargés de production et diffusion repartent avec des outils facilement applicables et transférables.

R : Peux-tu nous préciser à quel type de public ces formations s’adressent ?

S : C’est accessible à tous, pour tous niveaux (débutants et expérimentés). C’est aussi la variété des profils qui permet la constitution de groupes variés. Chaque formation est différente car elle n’est pas composée des mêmes individus. La formation s’ouvre évidemment aux chargé.e.s de production, de diffusion, aux administrateurs, qui sont déjà en poste mais aussi aux personnes qui auraient envie de développer des compétences, ou qui ont envie de devenir chargé.e.s de production/diffusion.
Une année, nous avons même eu quelqu’un d’une institution publique (et je trouve cela assez formidable) qui était venue pour comprendre la logique côté compagnie.
C’est ouvert à toutes les personnes qui ont envie d’avoir des outils ou d’être rassurées. Il y a des chargé.e.s de production qui viennent dans le parcours en ayant tous les outils à la clé. Ces personnes ont toutes leur place dans la formation, car finalement elles ont besoin de vérifier qu’elles ont bien ce qui leur fallait, et elles repartent enrichies d’autres choses…

R : As-tu eu des retours d’anciens stagiaires suite à cette formation ? Quel type de retours ?

S : Les retours ont toujours été plutôt positifs. Je parle de retours informels, puisque des retours objectifs sont récoltés et fournis à Confer.
Ce qui fait la qualité de cette formation est la place laissée au dialogue : je le perçois pendant les moments d’échange et les temps informels, tout le long de la formation on active des dialogues constructifs. La formation peut aussi bousculer certaines pratiques, car il faut repenser parfois le cadre, mais c’est le jeu.
Dans ces métiers, ces moments d’échange, de réunion, de travail, de formation sont très rares. Les chargé.e.s de production et diffusion travaillent pour leurs compagnies, vont voir des directeurs de lieux, etc… mais elles (car ce sont beaucoup des femmes) sont très isolées. Le fait de pouvoir partager les mêmes questions, les mêmes problématiques de métier, de regarder comment fait l’autre, c’est ce qui rend l’expérience joyeuse. C’est sortir de cet isolement, de cette solitude. Le cadre posé permet les échanges et ce sont les échanges entre les participants qui vont à leur tour nourrir la formation et ajuster les supports.

Ce parcours s’adresse aux personnes en découverte des métiers de la diffusion / production ainsi qu’aux professionnel.le.s plus aguerri.e.s désireux.ses de préciser une méthodologie.